Bruxelles sans gouvernement : une paralysie économique inquiétante – La Région de Bruxelles-Capitale traverse une crise politique majeure : aucun gouvernement depuis 233 jours. Ce blocage institutionnel n’est pas sans conséquences, tant pour les finances publiques que pour les acteurs économiques, en particulier les PME et les indépendants. Mais jusqu’où cette paralysie pourrait-elle affecter l’écosystème bruxellois ?
Un rating fragilisé : quel signal pour les investisseurs ?
En mars 2024, Standard & Poor’s a revu à la baisse la note de la Région de Bruxelles-Capitale (passant de A+ à A-, avec perspective stable), indiquant par là une dégradation de la confiance des investisseurs. Ce rating reflète globalement la capacité d’une entité à honorer ses obligations financières : il joue un rôle crucial dans l’attractivité économique d’une région. Cette dégradation a été effectuée avant les élections et se basait sur les prévisions budgétaires établies par la Région à l’époque.
Actuellement, l’absence prolongée de gouvernement amplifie cette instabilité. Sans cap clair et avec une absence totale de prise de décision, les entreprises ne veulent plus investir et préfèrent quitter la Région, impactant non seulement la création de valeurs mais également d’emploi à Bruxelles. Ce climat risque d’entraîner un effet boule de neige avec :
- une dégradation de la note de Bruxelles,
- une augmentation des taux d’emprunt et donc de ses charges d’intérêts, aggravant encore davantage la situation financière de la Région.
Des finances publiques sous tension
La détérioration des finances publiques bruxelloises est déjà perceptible. Selon des études récentes sur les finances locales et régionales, les dépenses ont explosé ces dernières années sous l’effet combiné des crises successives (sanitaire, énergétique, inflation) et de la mauvaise gestion en place . Les débats en commission finances lors de l’examen par la Cour des Comptes du budget en 12ème provisoires mis sur la table pour 2025 ont pu encore le démontrer. La dette publique de la Région atteint des sommets, fragilisant sa capacité à investir dans des projets structurants.
La dette consolidée de la Région est ainsi passée de 5,5 milliards d’euros en 2018 à 14,5 milliards en 2024. En ce qui concerne les recettes, celles-ci s’élèvent à 5,691 milliards d’euros fin 2024, tandis que les dépenses atteignent 6,990 milliards d’euros, générant de facto un déficit important.
L’absence d’un gouvernement capable de mettre en place des réformes budgétaires et des politiques économiques ciblées exacerbe cette dérive. Les indépendants et PME, qui dépendent souvent de soutiens économiques ou de mesures d’accompagnement financées par la Région, risquent de voir leurs opportunités se réduire. En outre, le manque de clarté sur l’évolution fiscale pourrait compliquer la vision économique à court/moyen terme de ces acteurs fondamentaux du tissu économique bruxellois.
Des répercussions directes sur les indépendants et PME
Les indépendants et PME constituent l’épine dorsale de l’économie bruxelloise. Cependant, plusieurs impacts négatifs se dessinent :
- Difficultés d’accès au financement : Avec un rating régional affaibli, les banques et autres institutions financières pourraient adopter une approche plus prudente envers les entreprises locales, réduisant ainsi leur accès à des crédits à taux avantageux.
- Incertitude fiscale : L’absence d’un cadre clair sur les politiques fiscales (notamment concernant les précomptes et taxes locales) complique la gestion financière des entreprises, limitant leurs capacités à investir et à se développer.
- Ralentissement des projets publics : Les retards dans l’approbation et la mise en œuvre de projets d’infrastructure privent de nombreuses PME de contrats cruciaux pour leur croissance.
- Pertes de confiance générale : Un climat d’instabilité politique décourage les nouveaux entrepreneurs, freinant l’innovation mais également la création d’emplois.
Les secteurs les plus touchés par l’instabilité politique
Le taux de croissance des PME sur le territoire bruxellois était de 0.6% pour l’année 2022 (soit une augmentation de 777 PME seulement). C’est le niveau de croissance le plus bas des 3 régions du pays mais également le plus bas de ces 10 dernières années. Certains secteurs sont particulièrement fragilisés et en grande difficulté (comme l’HORECA et le commerce de détail), voire en pleine en agonie (comme le commerce de gros).
Bruxelles face à un tournant stratégique pour relancer l’économie
Il est urgent pour la Région de Bruxelles-Capitale de se doter d’un gouvernement stable et fonctionnel. Non seulement pour restaurer la confiance des investisseurs et des citoyens, mais également pour permettre aux PME et indépendants de continuer à prospérer.
Des mesures claires et immédiates sont nécessaires pour inverser la tendance :
- Une stabilisation du cadre fiscal pour rassurer les entreprises.
- Une relance des projets d’investissements publics pour stimuler l’activité économique.
- Un renforcement des outils de soutien aux PME, comme des garanties de crédit et des mesures d’accompagnement.
Winston Churchill disait « Je ne me soucie jamais de l’action, mais seulement de l’inaction ».
Une région qui n’avance pas, ne peut que reculer. Pour les indépendants et PME bruxellois, avoir rapidement un gouvernement régional est bien plus qu’une simple question politique, c’est une question de survie économique !
Sébastien SPLINGARD & Julie LAMBOTTE
L'auteur.e de cet article
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