Concurrence déloyale ? Amazon bouscule les règles du jeu en Belgique

Personne assise au sol avec plusieurs cartons Amazon Prime fraîchement livrés en belgique

Amazon annonce plus d’un milliard d’euros d’investissements en Belgique d’ici 2027 : logistique renforcée (Anvers, Hamme), livraisons le jour même et soutien aux PME qui vendent sur la marketplace. C’est une bonne nouvelle pour l’attractivité du pays… à la condition non négociable d’un terrain de jeu équitable : que tout le monde soit soumis aux même règles, aux mêmes risques et aux même chances. Notre regard sur ces annonces.

Les ambitions d’Amazon

  • Amazon a annoncé qu’elle investira plus d’un milliard € entre 2025 et 2027 pour étendre son réseau (centre logistique à Anvers, R&D mécatronique à Hamme) et accélérer les livraisons pour en arriver à la livraison le jour-même. L’entreprise évoque aussi des recrutements (environ 400 salariés aujourd’hui) et la poursuite du partenariat actuel avec bpost.
  • En parallèle, Amazon promet d’aider les PME belges à toucher davantage de clients (en Belgique & à l’export), avec un support accru (données, IA, programmes vendeurs).

Bonne nouvelle pour l’économie belge ?

Derrière les grandes annonces, les promesses d’investissement et les bonnes intentions affichées, l’annonce d’Amazon a de quoi inquiéter les commerçants locaux. Et aussi les entreprises qui produisent sur les sol belge et européen.

❌ Une invasion non-contrôlée de micro-colis

En 2024, 4,9 milliard de micro-colis sont entrés dans l’UE. Et 90% d’entre eux étaient d’une valeur inférieure à 8€. Le problème : moins d’un centième de pourcent de ces colis sont effectivement contrôlés, soit environ 1 sur 12 000 !

Or, lorsque l’on se penche sur ces produits, on constate des taux de non-conformité alarmants. La majorité des produits vendus sur les plateformes ne respectent pas les standards européens auxquels est soumise notre industrie.

❌ Un préjudice économique et social bien réel

Le commerce local et indépendant est sous pression, ce n’est pas nouveau. Il est le second secteur qui connaît le plus de faillites en Belgique, juste derrière la construction. Ceci en dépit du fait que les consommateurs restent attachés au commerce local, comme l’a encore démontré notre enquête réalisée à l’occasion du Weekend du Client.

Aujourd’hui, se promener dans les artères commerciales, c’est faire face à 11% de vitrines vides. Un chiffre qui grimpe jusqu’à 36% dans les villes de taille moyenne comme Charleroi.

❌ Une bascule durable des usages

S’ils sont encore une majorité (60%) à privilégier les achats physiques, les comportements des consommateurs évoluent et continueront à évoluer. Rien qu’en 2024, les Belges ont dépensé 17,4 milliards € sur le web (+6,7 % par rapport à 2023), et 25 % des dépenses annuelles des ménages se font en ligne (produits + services).

Agir pour une concurrence loyale. Maintenant.

Il n’y a pourtant pas de fatalité. Le contexte, les acteurs, les opportunités et les difficultés sont aujourd’hui bien identifiées. L’heure est donc aux décisions et aux actes politiques. C’est la demande d’UNIZO et également la nôtre.

Voici quelques mesures prioritaires à mettre en œuvre pour donner de l’air aux commerçants de Wallonie et de Bruxelles :

✅ Les mêmes règles pour tous

La concurrence loyale, c’est d’abord créer « un level playing field » et s’assurer que tout le monde respecte les mêmes règles. Il est donc urgent de renforcer les douanes et la surveillance du marché. Les entreprises qui enfreignent massivement les normes de sécurité européennes doivent être sanctionnées lourdement et leurs produits écartés de notre marché rapidement.

✅ Rétablir l’équilibre

Il faut supprimer l’exemption de droits pour micro‑colis (≤ 150 €) et introduire un frais de traitement non discriminatoire par colis pour couvrir les coûts de contrôle. Le montant de 2€ a été évoqué. C’est un bon début, mais cela ne suffira pas à juguler l’invasion massive de produits chinois. Nous demandons au Gouvernement d’avoir le courage d’aller directement plus loin.

✅ Des retours gratuits qui coûtent cher

Les politiques de retour gratuit font mal aux petites entreprises, qui ne peuvent proposer ce service à leurs clients. Elles ouvrent la porte à de nombreux abus et comportements anti-environnementaux. Nous demandons de mieux encadrer les politiques de gratuité illimitée (hors défaut/erreur), d’introduire une contribution “pollueur payeur” par retour et de lutter contre les abus (commandes multiples « pour essayer »).

✅ Valoriser le « made in ici »

UCM demande la mise en place de campagnes nationales/régionales sur la valeur du commerce de proximité, qu’il soit physique, digital ou un peu des deux… Si voir arriver le(s) milliards d’investissement américain est certainement une bonne chose pour notre économie, c’est encore mieux de soutenir ceux qui produisent et vendent localement, tout en créant des emplois de qualité et non délocalisables.

✅ Outiller les commerçants

Enfin, vendre en ligne, c’est un métier a part entière. Il est donc crucial de pouvoir proposer des campagnes de sensibilisation et d’information a destination des commerçants indépendants afin qu’il tirent le meilleur parti des outils digitaux. Etre présent sur les plateformes demande une gestion et une approche spécifique pour s’assurer que l’activité et les coûts qu’elle représente apporte une vraie plus-value économique et qu’elle puisse efficacement compléter l’offre physique afin de répondre aux besoin du pus grand nombre de consommateurs.

L’heure est au courage !

Pour les commerçants, Amazon est un outil formidable. L’annonce d’un investissement important est un signe de confiance positif dans notre économie et les réformes qui se mettent en place. Pour le commerce indépendant, il n’aura d’impact positif que s’il est mis au service de la compétitivité du pays et que les autorités peuvent garantir une concurrence loyale ainsi qu’une application effective des règles. Sans cela, nous accélérerons l’érosion du commerce local et toutes les conséquences négatives qui y sont liées (vacance, faillites, perte de lien social).

UCM appelle les autorités belges et européennes à agir maintenant : contrôles, cadre numérique, fin des privilèges douaniers et mise en œuvre ambitieuse des nouveaux outils européens (douanes, durabilité, lutte contre le travail forcé).

Olivier Vandenabeele

Olivier Vandenabeele

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