L’accès des indépendants à une protection sociale suffisante est une priorité dans toute l’Union européenne. La Belgique a accompli des progrès importants ces 15 dernières années. Il reste cependant essentiel de préserver un modèle qui tienne compte de la réalité spécifique des indépendants, en maintenant un bon rapport entre droits et cotisations.
La protection sociale des indépendants en Europe : contexte et enjeux
A l’invitation du CEPLIS (Conseil européen des Professions libérales), UCM participait cette semaine au colloque autour du projet d’étude SP4SE (Social Protection For Self-Employed), visant à comparer la protection sociale des travailleurs indépendants en Belgique, en France, en Allemagne, en Irlande, en Italie, à Malte et finalement en Roumanie.
L’objectif est aussi de voir dans quelle mesure et comment ces différents Etats répondent au prescrit de la Recommandation européenne 387/2019. C’est ce texte européen qui place un cadre assez contraignant sur l’accès des citoyens, aussi des travailleurs indépendants, à une couverture sociale similaire à celle des travailleurs salariés.
Ce n’est pas sans poser des questions importantes au regard des enjeux et des intérêts des entrepreneurs.
Accès de tous à une protection sociale suffisante : où se situe la Belgique face à ses voisins européens ?
En 2019, la recommandation 2019/387 du Conseil européen a invité les États membres à garantir à tous les travailleurs, y compris les indépendants, un accès à une protection sociale adéquate. Le texte pose des principes clairs : accès formel, couverture effective, transfert des droits, information transparente.
Depuis, des progrès ont été enregistrés dans plusieurs pays. Les indépendants ont souvent gagné un droit d’accès élargi à des régimes auparavant réservés aux salariés. Toutefois, les disparités restent marquées entre États membres :
- Dans les pays nordiques ou en France, les indépendants bénéficient d’une couverture quasiment équivalente à celle des salariés, notamment en matière de soins de santé et de pension.
- En Belgique, en Allemagne ou en Autriche, le système reste spécifique mais complet, avec des prestations différenciées.
- Dans certains États d’Europe de l’Est, la couverture reste partielle et souvent inadaptée, malgré des cotisations déjà importantes.

🟦 Pour UCM, le défi commun doit rester d’assurer un bon rapport entre, premièrement, l’étendue de la protection sociale ; deuxièmement, la façon dont cela rencontre les priorités des indépendants ; et troisièmement, le coût : les cotisations doivent rester soutenables.
Quelles avancées pour les indépendants belges depuis 2008 ?
En Belgique, la protection sociale des indépendants a beaucoup évolué depuis 15 ans. Ce qui était jadis un système de solidarité minimale s’est transformé en un régime de sécurité sociale complet :
- 2008 : droit au remboursement des soins de santé dans les mêmes conditions que les salariés.
- 2016 : égalisation des montants de la pension minimum avec le régime salarié.
- 2018 : indemnités dès le 1er jour d’incapacité, si arrêt maladie de 7 jours et plus.
- 2019 : introduction du congé de maternité indépendant aligné sur celui des salariées.
- 2020 : renforcement des droits au droit passerelle et meilleur accès aux soins psychologiques.
- 2021 : harmonisation des règles de calcul à la pension (taux de remplacement visé de 60%).
Ces avancées ont permis de réduire les écarts avec les salariés, tout en gardant un système adapté à la logique entrepreneuriale.
En Belgique : un modèle spécifique, raisonnable et centré sur les vraies priorités des entrepreneurs
Lors de ce colloque, UCM a pu rappeler ce qui ressort des études régulières menées par le Service d’études UCM. A savoir que les indépendants en Belgique n’attendent pas une copie du régime des salariés. Ce régime salarié est en Belgique très coûteux.
Au titre de comparaison, le coût de l’assurance chômage des salariés s’élève à 5 milliards d’euros (sans même tenir compte du coût de l’assimilation : les coûts de pension futurs), tandis que le régime de « droit passerelle pour indépendants » représente des dépenses annuelles inférieures à 20 millions d’euros.

Les indépendants souhaitent un système qui répond à leurs besoins réels, sans surcoût inutile. Plusieurs principes guident cette attente :
- Une pension digne, car c’est le principal filet de sécurité à long terme.
- Une couverture santé solide pour les risques graves (hospitalisation, incapacité de longue durée).
- Des cotisations limitées et proportionnées aux revenus, avec un régime simple et prévisible.
La Belgique a su construire un compromis équilibré : une sécurité sociale publique obligatoire et forte, une priorité placée sur les risques les plus graves, et une modération des cotisations (20,5 %).
À l’heure où certains appellent à une harmonisation européenne ou à un alignement complet sur les salariés, il est crucial de préserver l’identité du régime des indépendants : un bon rapport qualité-prix, centré sur l’essentiel, en phase avec la réalité entrepreneuriale.
L'auteur.e de cet article
- La sécurité sociale des travailleurs indépendants reste un levier important pour développer l'entreprenariat. J'écris ici, avec le Service d'Etudes, pour défendre les intérêts des indépendants en matière de pensions, de droit passerelle, d'assurance maladie-invalidité,... N'hésitez pas à réagir et à commenter.
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