La rentrée UCM Liège a choisi de mettre un sujet brûlant sur la table : la réindustrialisation en Wallonie. Mais pourquoi ce thème, et surtout, pourquoi maintenant ? Parce que relancer notre tissu économique, relocaliser une partie de la production et renforcer notre autonomie sont devenus des enjeux majeurs pour la Région. Pourtant, pour les PME et TPE francophones, faire entendre leur voix dans ce débat ressemble souvent à un véritable parcours du combattant. UCM est à leurs côtés.
Les PME industrielles : un pilier discret mais essentiel
Quelques chiffres frappants : en Wallonie, on compte plus de 50 000 PME industrielles. Et moins de 200 entreprises dépassent les 50 employés ! 65 % des structures industrielles wallonnes sont donc de toutes petites entreprises, générant tout de même près de 150 000 emplois. L’industrie reste le troisième secteur économique du pays, mais sa part dans le PIB diminue et sa santé financière demeure fragile.
Dans quels secteurs ces PME sont-elles actives ? On retrouve la mécanique (fabrication de pièces, accessoires), l’alimentaire (transformation de matières premières en produits finis), la réparation de machines, l’imprimerie, et bien sûr, le secteur du bois – logique dans une région couverte à 30 % de forêts. Bref, l’industrie wallonne, ce n’est pas que les « grandes usines » : c’est surtout un tissu dense de petites structures agiles, innovantes et indispensables à la vitalité économique des grandes industries. Elles sont tantôt sous-traitantes, tantôt fournisseurs de biens ou de services à forte valeur ajoutée.

Ce que révèle l’enquête UCM
Pour objectiver les besoins et les freins des PME, UCM a mené une grande enquête auprès de ses membres. Résultat : 320 participants, dont 88 % en Wallonie, et un constat marquant : 65 % des PME industrielles ont moins de 5 ETP, mais 75 % existent depuis plus de 10 ans. Preuve de leur résilience, malgré les crises successives. Mais ce chiffre cache aussi une réalité : peu de jeunes pousses ou de startups osent se lancer dans l’industrie.
L’enquête fait ressortir quatre grands axes :
- Un écosystème collaboratif : 72 % des PME travaillent avec d’autres entreprises partenaires, créant ainsi de l’emploi en cascade. 77 % des contrats sont rentables, preuve que la valeur ajoutée est reconnue.
- Un ancrage local fort : Moins de 20 % des PME travaillent avec des partenaires étrangers, même proches. Les chaînes de valeur restent très locales, ce qui est logique pour certains secteurs, mais peut limiter les opportunités pour d’autres. A peine 30% des répondants travaillent avec des multinationales, démonstration également de la difficulté des PME de capter des opportunités au-delà de nos frontières
- Des services à haute valeur ajoutée : Les PME industrielles wallonnes se distinguent par la qualité de leurs services techniques et scientifiques, mais expriment un besoin fort en formations adaptées pour garder un niveau de qualité reconnu.
- Des difficultés persistantes : Coût et disponibilité de la main-d’œuvre, prix de l’énergie, délais de paiement imposés par les donneurs d’ordre, complexité administrative… Autant de freins qui poussent près de la moitié des PME à refuser des opportunités, par peur ou manque de moyens. Autre point particulier : la responsabilité et les obligations liées aux contrats. (A quelles conditions puis-je m’engager avec un partenaire, quelles sont mes responsabilités sur les produits ?)

Accompagner, simplifier, oser
Face à ces constats, UCM plaide pour un accompagnement renforcé des PME industrielles : simplification administrative, soutien à la prise de risque, accès à une énergie abordable et décarbonée, et surtout, une politique publique qui protège les intérêts locaux (notamment via la commande publique). L’internationalisation reste un défi : si la Flandre exporte massivement, les PME wallonnes hésitent encore à franchir le pas, souvent par manque d’accompagnement ou de suivi après un premier contact avec les opérateurs publics qui peuvent les soutenir.
La double transition – durable et technologique – s’impose à tous. Mais sans réforme de la fiscalité sur le travail et sans soutien à la formation, la compétitivité risque de s’éroder. L’économie circulaire, elle, fait sens pour certains secteurs, moins pour d’autres, dépend de la valeur ajoutée des produits. Néanmoins, cet intérêt pour la circularité peut être renforcé grâce à un cadre légal revu et optimisé (ex : transport de matières secondaires).
Conclusion : les PME prêtes à jouer le jeu, mais…
La collaboration entre PME est non seulement nécessaire, mais rentable. La majorité d’entre elles souhaite élargir ses activités, tout en gardant la maîtrise de sa production. Mais le potentiel industriel wallon reste sous-exploité : une PME sur deux renonce à une opportunité par crainte des marges, des délais de paiement ou de la complexité juridique. Il y a donc une vraie attente vis-à-vis des pouvoirs publics pour lever ces freins.
Les PME wallonnes sont prêtes à relever le défi de la réindustrialisation, à condition d’être mieux guidées, soutenues et encouragées à oser. À la clé : un tissu industriel plus résilient, innovant et créateur de valeur pour toute la région.
UCM continue de porter leur voix au quotidien auprès de l’administration et des politiques en participant assidument aux initiatives régionales et fédérales telles que MAKE 2025-2030 ou le forum industriel wallon. Les PME sont notre pilier soutenant l’industrie, elle doivent être reconnues comme telles.
L'auteur.e de cet article
- Conseiller Lobby - Chargé des études socio-économiques au Service d'Etudes
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