L’heure est à la réforme, pas aux sanctions

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La ministre des Pensions veut que les entreprises engagent davantage de sexagénaires, sous peine d’amende. Sanctionner les entreprises là où il faudrait les inciter est une mauvaise approche. Le faire pour compenser l’absence de réforme frise l’indécence.

Les débats sur les réformes ont lieu à coup de sorties « presse » des uns et des autres.  La création d’un Fonds visant à faire financer une partie des coûts du vieillissement sur le dos des employeurs faisait les grands titres de la presse de ce 13 février.  L’idée vient de la ministre Karine Lalieux (PS).  L’occasion pour UCM de rappeler les véritables enjeux, de revenir sur les écueils de nos pensions d’abord, et de notre marché du travail ensuite. Ecueils qui minent toujours un peu plus le moral des chefs d’entreprise.

« C’est idiot de rester jusqu’à l’âge de la retraite »

Le constat est d’une cruelle évidence. P. DEVOLDER (professeur à l’UCLouvain) ne ménageait pas ses mots pour analyser un système de pension qui n’incite en rien à rester sur le marché du travail. Pour la raison simple qu’il reste financièrement plus avantageux de quitter le marché du travail dès que la possibilité en est offerte.

C’est cela que nous combattons. Avec des propositions. Nous demandons en effet de longue date une réforme des pensions qui n’interdit pas de partir plus tôt, mais adapte en conséquence (par des corrections actuarielles) le montant de la pension. Pour inciter à rester actif, mais aussi pour maîtriser financièrement le coût social de ces départs anticipés.

Nous savons par ailleurs qu’une telle réforme n’est envisageable que si la personne toujours active a une visibilité précise de ses droits. Des efforts sont faits en ce sens et il faut le saluer. Mais la visibilité parfaite du quand et du combien, nous n’y sommes pas encore…

Ne pas prendre ces mesures, c’est laisser filer les coûts de nos pensions sans les maitriser. Or, en plus de ne tenir aucun compte de ces recommandations, l’actuel Gouvernement prend des mesures, par exemple le « bonus de pension » en juillet dernier, pour alourdir encore les dépenses !

Nous appelons à corriger cette trajectoire. Et mettre les entreprises à l’amende pour faire l’appoint, ce sera non !

Le marché du travail a besoin d’aînés

En période de pénurie de main d’œuvre, chaque compétence compte, singulièrement quand il s’agit de travailleurs expérimentés. Mais nos coûts salariaux imposent le contraire.

L’évolution de nos salaires, donc de nos coûts salariaux, est encore trop alignée sur l’âge des travailleurs. Plus un travailleur prend de l’âge, plus il coûte cher. Alors que nous plaidons depuis longtemps contre cette logique qui dissuade d’engager des travailleurs de plus de 55 ans. Nous devons corriger nos barèmes pour que le travailleur puisse évoluer plus vite en début de carrière, et moins vite lorsque le travailleur prend de l’expérience (et sera peut-être davantage demandeur de congés que de salaire).

De plus, l’employeur qui paie de plus en plus cher son travailleur âgé est de moins en moins aidé. Les aides à l’emploi, aujourd’hui régionales, qui sont supposées réduire les charges patronales pour favoriser l’engagement de travailleurs âgés, ont été drastiquement réduites ces dernières années, dans les trois Régions. C’est incohérent.

Il est encore temps

Dans l’état actuel des réformes des pensions, des coûts salariaux et des aides à l’emploi, il est donc tout à fait hallucinant de créer à charge des employeurs une amende visant à alimenter un fonds de financement des pensions.

Nous appelons par contre à prendre des décisions importantes pour la soutenabilité financière de notre régime de pension.

D’abord, il faut postposer la dernière augmentation de la pension minium prévue au 1er janvier 2024.

Ensuite, il faut stopper le bonus pension. Coûteux, complexe et inacceptable tant que des corrections actuarielles ne seront pas mises en place.

Enfin, et peut être surtout, il faut mieux récompenser le travail et donner plus de visibilité à l’intérêt de travailler et de cotiser, aussi sur MyPension (données des droits constitués, année par année)

Les partenaires sociaux vont exprimer ces attentes dans un avis au Comité national des pensions (commission ad hoc). L’idée est de développer les bases d’un contrat social où l’on conserve une haute performance sociale, où l’on devra faire en sorte e.a.  que les systèmes des pensions encouragent davantage le travail et les cotisations sociales (qui le financent).

Matthieu DEWEVRE

Matthieu DEWEVRE

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