Heures d’ouverture des commerces : un enjeu de société(s)

Femme faisant du shopping dans un magasin de vêtements en Belgique le dimanche

La question de l’assouplissement de la réglementation sur les heures d’ouverture est un marronnier politique. Pas une législature ne se passe sans qu’une proposition de loi ne soit déposée pour modifier, renforcer, assouplir la loi sur les heures d’ouverture. Oui, sauf que cette fois, c’est écrit dans l’accord de Gouvernement.

En tout cas, dans la « deuxième version » de l’accord, où l’on peut lire :

L’interdiction du travail de nuit est supprimée, ainsi que le jour de fermeture obligatoire prévu par la loi. La réglementation en matière d’heures d’ouverture est assouplie.

C’est dire que le sujet est sensible. Il touche tout le monde, qu’on soit commerçant ou consommateur, travailleur salarié ou indépendant. Rappel des enjeux et de la position d’UCM sur le sujet.

Les heures d’ouverture : assouplir pour simplifier

La règlementation actuelle permet d’ouvrir de 5h à 20h, et jusqu’à 21h les vendredis et veilles de jours fériés. Cela représente déjà 15 heures d’ouverture. Une longue journée, donc, pour celui qui tient son commerce seul. Dans les faits, on ne voit pas de commerces exploitant la totalité de cette plage, déjà assez large. Tout simplement parce qu’il n’y a pas de demande des consommateurs. Pas suffisante en tout cas pour que ce soit rentable pour un commerce indépendant.

Ouvrir son commerce, cela représente – aussi – un coût. Il y a les coûts de l’énergie et ceux liés au personnel. Il n’est d’ailleurs pas légal de faire travailler ses employés autant d’heures d’affilée dans son magasin. Ouvrir plus longtemps, c’est donc devoir soi-même faire de plus longues journées ou avoir un personnel suffisant pour le faire tourner sur la journée, ce qui n’est pas évident pour les plus petits commerces.

Ceci étant, on peut faire le constat que chaque commerce a ses propres spécificités, et que chacun essaye de se démarquer en proposant à ses clients une offre qui répond au mieux à leurs attentes. Nous avons toujours plaidé pour un dispositif qui soit clair. C’est pourquoi l’idée d’harmoniser l’heure de fermeture – par exemple à 21h ou 22h – en supprimant l’exception pour les fermetures tardives du vendredi ou de veille d’un jour férié peut répondre à un besoin de flexibilité exprimé par certains commerçants indépendants, les plus jeunes notamment.

Le repos hebdomadaire : un pilier sociétal

La proposition d’abrogation de l’obligation du jour de repos hebdomadaire, souvent le dimanche, suscite de vives inquiétudes. UCM s’est toujours opposée fermement à une libéralisation totale. Pourquoi ?

☑️ Un équilibre vie privée / vie professionnelle à préserver

Les commerçants indépendants – aussi – ont une famille. Eux aussi ont besoin d’un peu de temps pour se reposer ou se consacrer à la charge administrative et organisationnelle que génère l’exercice d’une activité indépendante. C’est le cas aussi de leur personnel qu’ils ne peuvent bien sûr pas faire travailler 7 jours sur 7.

☑️ L’égalité des armes

Parce que le commerce indépendant est un secteur sous pression : après l’HORECA, c’est celui qui a enregistré le plus de faillites en 2024. Une ouverture 7 jours sur 7 va favoriser les grands groupes qui disposent des moyens financiers et organisationnels pour assurer une présence continue de leur personnel, au détriment des petits commerces. Une enquête réalisée en décembre 2024 auprès des commerçants indépendants révèle que 80 % d’entre eux ne voient aucun avantage économique à ouvrir le dimanche.

☑️ Un principe, des exceptions

Le système actuel s’est construit au fil du temps sur base d’un principe général : l’obligation de fermer son commerce pendant 24 heures au moins une fois sur la semaine ; et sur des exceptions : la vente à domicile, les commerces dans les gares et aéroports, les librairies etc… Ce système par exceptions, bien qu’il présente une certaine complexité, a le mérite de répondre aux besoins exprimés par chaque secteur.

Il y a cependant de l’espace pour la clarification (la distinction entre « libraire » et « magasin de nuit »), la modernisation (les magasins de téléphonie n’existent plus, par exemple) et l’intégration de nouveaux secteurs (comme le secteur alimentaire, du bricolage ou celui des jardineries). Actualiser les exceptions, mieux les définir, ne pas poser le dimanche comme jour absolu de fermeture, permettre de changer facilement ce jour (actuellement, il faut maintenir le même jour pendant au moins 3 mois). La marge pour gagner en lisibilité est importante !

☑️ Un enjeu de société

Chez UCM, nous sommes convaincus que la question du repos hebdomadaire n’est pas qu’une pure question économique ou d’emploi. Il structure la vie sociale, familiale, associative, culturelle et l’organisation des cultes en Belgique. Supprimer cette obligation pourrait bouleverser ces équilibres, avec des conséquences qui dépassent le seul cadre économique. C’est pourquoi nous appelons le Gouvernement et en particulier Madame la ministre Eléonore Simonet à la prudence et à une large consultation sur cet enjeu sensible.

Olivier Vandenabeele

Olivier Vandenabeele

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